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Biographie du Saddhou Sundar Singh

À LA RECHERCHE DE LA PAIX

Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant. Ps. 42. 3.

C'est au sein de cette tribu religieuse et guerrière que naquit, le 3 septembre 1889, le Sadhou Sundar Singh.

Sa famille habitait une demeure ancestrale à Rampour, village sikh dans l'État de Patiala, au nord du Punjab. Son père, Sardar Sher Singh, était un Sikh de la classe dirigeante et instruite ; il possédait une grande fortune et était considéré par les villageois des environs comme leur chef. Sundar, le cadet de la famille, fut élevé, comme ses deux frères et sa soeur, au milieu du luxe et de tout le confort possibles. Durant la saison chaude, la famille passait en général l'été à Simla, dans l'Himalaya. La vie domestique n'était point encore atteinte par la civilisation moderne, et les anciennes traditions religieuses étaient strictement observées. Une noble dignité régnait dans ce milieu.

La mère de Sundar était une femme remarquable par la pureté de son caractère et sa grande piété. Remplissant fidèlement ses devoirs religieux, certains jours elle jeûnait afin que ses prières fussent plus dignes de son Dieu ; toute son âme se répandait en dévotions. Jamais agitée ou surmenée, ses occupations de maîtresse de maison étaient tout imprégnées de son attitude spirituelle. Elle avait une affection toute spéciale pour son fils cadet et lui apprit tout ce qu'un jeune garçon doit apprendre de sa mère : être pur et véridique, brave et généreux, serviable, courtois envers chacun, et persévérant dans sa piété. Elle lui transmit très tôt son grand désir de faire de lui un « Sadhou », un être mis à part pour Dieu. Les Sadhous sont des hommes saints qui, abandonnant toute possession terrestre, vont de lieu en lieu, vêtus d'une longue robe jaune safran, méditant, prêchant, enseignant, respectés de tous et vivant de la charité qui leur est offerte.

Sundar était constamment auprès de sa mère ; elle lui disait souvent :- il ne faut pas que tu sois insouciant et mondain comme tes frères, il faut que tu aimes la religion et que tu cherches la paix de l'âme et un jour tu deviendras un Sadhou. C'est elle qui lui apprit qu'il y a une paix du coeur « Shanti » qui est le plus précieux trésor du monde, et qu'on ne peut l'acquérir qu'en la recherchant avec persévérance. C'est elle qui a éveillé en lui ce désir intense de trouver la perle de grand prix. Il en vint très tôt à considérer cette vie de Sadhou comme la seule digne d'être vécue.

Voici ce qu'il dit lui-même sur son enfance et au sujet de sa mère pour laquelle il a toujours gardé une grande vénération et une profonde affection : - je suis né dans une famille sikh où l'hindouisme était la base de l'éducation. Ma mère était pour moi une vivante image de cet enseignement. Elle se levait avant la lumière du jour et, son bain pris, avant de faire quoi que ce soit d'autre, lisait les livres sacrés hindous. J'ai été influencé plus que le reste de la famille par sa vie pure et son exemple. De bonne heure elle a imprimé en moi la notion que mon premier devoir en me levant, avant de prendre aucun aliment, était de prier Dieu afin d'obtenir sa bénédiction et la nourriture spirituelle de mon âme. J'insistais parfois pour avoir d'abord mon déjeuner, mais ma mère, avec amour ou sévérité a fermement fixé dans mon esprit cette nécessité de chercher Dieu en tout premier lieu. Bien que je fusse trop jeune alors pour apprécier la valeur de cette habitude, j'en compris l'importance dans la suite et je remercie Dieu pour l'éducation et l'exemple que j'ai reçus dans ce domaine.

Ce témoignage rendu par son fils à une mère hindoue est bien fait pour remplir de confusion plus d'une mère chrétienne, qui n'a pas compris l'importance qu'il y a à inculquer à ses enfants l'habitude de lire la parole de Dieu et de consacrer quelques instants à la prière avant de commencer la journée. Sundar Singh est un exemple frappant de l'influence profonde que peut exercer cette sainte obligation pour l'orientation de toute la vie. - je ne pourrai jamais être assez reconnaissant à Dieu, dit-il, de m'avoir donné une telle mère, qui dans mon enfance a imprimé en moi l'amour et la crainte de Dieu. Elle a été pour moi la meilleure école de théologie et elle me prépara, autant que ce fut en son pouvoir, à consacrer ma vie a Dieu.

Il déclarait avec une profonde émotion que sa mère seule, par ses prières quand il était enfant, l'a gardé près de Dieu. Elle a été inconsciemment l'instrument pour le conduire à Jésus. Si elle avait vécu plus longtemps, il était convaincu qu'elle serait arrivée à la pleine connaissance du Christ comme lui-même. Il ne pouvait, dans sa pensée, séparer sa mère bien-aimée de l'amour du Sauveur. Comme pour la plupart des hommes et des femmes de profonde conviction, le fondement de la foi de Sundar a été posé dans l'enfance. Aucune base de vie religieuse n'est aussi solide que celle-là. - je crois, dira-t-il plus tard, que tout homme religieux a eu une mère religieuse. (Cette vaste généralisation, provenant de sa propre expérience, n'est pas loin de la vérité.)

Elle instruisit son fils pendant sa petite enfance, puis le remit à un maître, un « Pundit » et a un Sadhou sikh. L'un et l'autre venaient deux ou trois heures par jour l'initier à la connaissance des écrits sacrés. Fort jeune il apprit à lire, et sut par coeur une grande partie du Granth, non pas en ourdou, sa langue maternelle, mais en sanscrit. Celui-ci était pour les Sikhs ce qu'est le latin pour nos pays d'Europe. À mesure que Sundar grandissait, s'éveillait en lui une soif de plus en plus intense de trouver cette paix « Shanti » dont sa mère lui avait tant parlé, et qui est à la fois la paix du coeur et la pleine satisfaction de l'âme. Il ne se souciait guère des jeux des garçons de son âge et cherchait à apaiser le désir ardent de son coeur en étudiant les livres saints.- Souvent tard dans la nuit, dit-il, je lisais, non seulement les livres sacrés des Sikhs, mais encore ceux de la religion hindoue et aussi le Coran des musulmans, dans l'espoir de trouver la paix. Mon père m'en blâmait.- C'est nuisible pour ta santé, me disait-il. Les garçons de ton âge ne pensent qu'à jouer. Pourquoi cette manie te possède-t-elle si jeune ? Tu auras bien le temps de songer à ces choses plus tard dans la vie. C'est sans doute ta mère et le Sadhou qui t'ont inculqué ces idées

- Mes maîtres, dira Sundar, m'enseignèrent avec beaucoup de sympathie et me mirent au bénéfice de leurs expériences, mais il n'y avait pas en eux-mêmes la véritable bénédiction à laquelle mon âme aspirait. Comment auraient-ils pu m'aider à la recevoir ? J'exposais fréquemment au « pundit » mes difficultés spirituelles, mais il me répondait qu'en grandissant j'acquerrais plus d'expérience et que ces difficultés s'évanouiraient d'elles-mêmes.- Ne vous tourmentez pas au sujet de ces choses, suivez le conseil de votre père.- Mais, lui dis-je, supposez que je ne vive pas jusqu'à l'âge adulte, alors qu'arrivera-t-il ? Si un garçon affamé demande du pain, vous ne lui direz pas : Va, amuse-toi et lorsque tu seras grand et que tu pourras comprendre le sens réel de la faim, alors tu recevras du pain ! Sera-t-il satisfait en jouant, s'il a faim, et pourra-t-il attendre d'être grand pour recevoir la nourriture dont il a besoin ? Il veut manger maintenant : je suis affamé du pain spirituel, je le veux maintenant. Si vous ne l'avez pas reçu vous-mêmes, je vous en prie, dites-moi où et comment je peux le recevoir.- Le « pundit » répondait :- Vous ne pouvez encore comprendre ces choses profondes et spirituelles, un temps prolongé est essentiel. Pourquoi avezvous tant de hâte ? Si cette soif de votre âme n'est pas satisfaite dans cette vie, elle le sera dans votre prochaine réincarnation.- Il s'évadait ainsi et mon problème n'était pas résolu.

Le Sadhou, lui aussi, ne me donnait qu'une réponse évasive.- Ne vous tourmentez pas, il est inutile de perdre votre temps à résoudre ces questions ; le temps viendra où toutes vos difficultés s'évanouiront. - J'étais désappointé et ne trouvais nulle part cette nourriture spirituelle dont j'étais affamé. Dès mes plus jeunes années, ma mère m'enseigna à m'abstenir de toutes les formes du péché et à venir en aide à tous ceux qui étaient dans le malheur. Un jour mon père me donna quelque argent de poche. je courus au bazar pour le dépenser. En chemin, je rencontrai une très vieille femme pauvre, qui avait froid et faim ; elle me demanda l'aumône et je ressentis une telle pitié pour elle que je lui donnai tout mon argent. En rentrant à la maison, je dis à mon père qu'il devait procurer à cette pauvre femme une bonne couverture, sinon elle mourrait de froid. Il me renvoya, expliquant qu'il l'avait déjà secourue et que c'était le tour des voisins de faire leur part.

Quand je vis qu'il refusait de lui venir en aide, Je pris cinq roupies dans son porte-monnaie dans l'intention d'acheter la couverture. J'eus d'abord une grande satisfaction en pensant que je pourrais secourir cette femme, mais bientôt la pensée que j'étais un voleur me tourmenta. Le reproche de ma conscience augmenta encore lorsque le soir mon père, découvrant qu'il lui manquait cinq roupies, me demanda si je les avais prises et que je le niai. J'échappai au châtiment, mais ma conscience me tourmenta toute la nuit, m'empêchant de dormir. Le matin de bonne heure, j'allai vers mon père et lui confessai mon vol et mon mensonge en lui rendant l'argent. Le fardeau qui pesait sur mon coeur tomba aussitôt et mon père, au lieu de me punir, me prit dans ses bras et me dit avec des larmes dans les yeux :- Mon fils, j'ai toujours eu confiance en toi et maintenant j'ai la preuve que je ne me suis pas trompé.- Non seulement il me pardonna et me donna les cinq roupies pour la pauvre femme, mais il en ajouta une pour moi.

Dans la suite il ne refusa jamais ce que je lui demandai et, de mon côté, je résolus de ne plus faire quelque chose contre ma conscience ou contre la volonté de mes parents. Le moment vint où Sundar fut envoyé pour son éducation dans l'école de la Mission presbytérienne américaine. Là, il subit une nouvelle influence, car chaque jour il entendait la lecture de la Bible des chrétiens. Son sang sikh se réveilla et la colère bouillonnait en lui. Pourquoi devait-il écouter pareille chose ?- je suis Sikh et c'est le Granth qui est notre livre saint !- Tout son être se rebella. Il acheta un Nouveau Testament, mais tout ce qu'il y trouva ne fit qu'augmenter sa haine du christianisme. Il avait quatorze ans lorsqu'il eut la grande douleur de perdre sa mère si tendrement aimée. Peu après son frère aîné mourut aussi. Ce fut un grand chagrin dans sa vie.- La pensée que je ne les reverrais jamais, dit-il, me jeta dans le désespoir, car je ne pouvais savoir sous quelle forme ils renaîtraient, ni deviner ce que je serais moi-même dans une existence future. Dans la religion hindoue la seule consolation pour un coeur brisé comme le mien, était de me soumettre et de m'incliner devant l'inexorable loi du Karma *.

Après la mort de sa mère, le désir de trouver la vérité qui repose derrière le voile de l'existence humaine devint de plus en plus impérieux.- Les choses de ce monde ne peuvent me satisfaire, disait-il, je dois trouver Dieu à tout prix. À côté de ses études, il apprit à pratiquer le « Yoga » il réussit à entrer dans un état de transe qui lui procurait un soulagement passager, mais après lequel il était plus désemparé qu'auparavant. D'une part il constatait la totale impuissance de sa religion ; d'autre part il estimait le christianisme faux et s'y opposait de toutes ses forces. Son père voyant sa haine devenir de plus en plus violente, décida de l'envoyer dans une école du gouvernement plus éloignée de Rampour, mais la longue marche, par une chaleur suffocante, fut plus qu'il ne put supporter et il dut revenir à sa première école et réentendre lire la Bible jour après jour. Son fanatisme le mit bientôt à la tête des adversaires du christianisme.- Je haïssais le Christ, je pensais que les missionnaires avaient une religion fausse et qu'ils étaient venus pour corrompre notre peuple. Je me rappelle le jour où je leur jetai des pierres et demandai aux serviteurs de mon père d'en faire autant.

Malgré la haine féroce de Sundar, le levain de l'Évangile pénétrait peu à peu en lui sans qu'il s'en doutât. L'enseignement sur l'amour de Dieu l'attirait malgré lui. Le récit de la Croix l'impressionna vivement. Certains le mettaient en garde contre la Bible :- Ne lisez pas ce livre, lui disait-on, car il y a en lui un pouvoir magique qui ferait de vous un chrétien.- Il sentait une mystérieuse puissance se dégager, comme une attraction divine, de la Parole de Dieu, mais il ne voulait pas s'y abandonner.- Nous sommes Sikhs, c'est le Granth qui est notre livre sacré ; il peut y avoir de bonnes choses dans la Bible, mais elle est contre notre religion.

Cependant dans les profondeurs de son âme tourmentée sonnait l'appel du Christ : « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et vous trouverez le repos de vos âmes. » Ce repos de l'âme, n'était-ce pas là ce qu'il désirait si ardemment ? Une autre parole du Christ avait pénétré profondément en lui : « Dieu a tant aimé le monde qu'Il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle. » Ces affirmations revenaient constamment à son esprit, sans qu'il en pût saisir toute la signification. Personne, dans la religion hindoue, n'avait pu dire : « Je vous donnerai le repos » et moins encore : « je vous donnerai la vie éternelle ». Comment Jésus, un simple homme pourrait-il le faire ? Lui qui n'avait pu se sauver lui-même, pouvait-il sauver les autres ? L'hindouisme est la plus belle religion du monde, pensait Sundar ; puisqu'il ne peut me donner ce repos, comment une autre religion pourrait-elle le faire ?

- J'étais si fermement ancré dans mon opinion, et mon trouble intérieur était si grand qu'un jour- c'était le 16 décembre 1904- je déchirai la Bible et la jetai au feu. Mon père qui était présent me dit- Pourquoi, mon fils, fais-tu une chose aussi stupide ?- Parce que cette religion de l'Occident est fausse et que nous devons la détruire. Je pensais avoir fait une bonne action en brûlant la Bible ; cependant le trouble de mon coeur ne fit qu'augmenter et j'étais tourmenté par le doute et l'inquiétude. Où était la vérité ? Y a-t-il un Dieu ? Jésus-Christ n'était qu'un homme, mort il y a dix-neuf cents ans ! Pendant deux jours je fus très malheureux. je ne pus supporter cette angoisse de mon âme et pris la résolution de mettre fin à mes jours : si je ne pouvais trouver la vérité dans cette vie, je l'obtiendrais dans la vie future.

Sundar n'avait alors que quinze ans, mais un jeune Hindou de quinze ans est beaucoup plus développé qu'un Européen du même âge, et le suicide n'est pas condamné aux Indes comme il l'est chez nous. Sundar alla vers son père :- je viens vous dire adieu, je serais mort demain matin.- Pourquoi veux-tu te tuer ?- Parce que la religion hindoue ne peut me satisfaire, ni la richesse, ni le confort, ni aucune possession, ni votre argent. Tout cela peut satisfaire les besoins de mon corps, mais pas les aspirations de mon âme. J'en ai assez de cette misérable vie, je veux y mettre fin.

Sundar fit soigneusement ses plans. La ligne du chemin de fer traversait l'extrémité de leur propriété et chaque matin à 5 heures l'express y passait. S'il ne trouvait pas la réponse qu'il attendait, il se jetterait sous le train. Sundar s'éveilla à 3 heures du matin. C'était le 18 décembre. Il prit un bain froid, puis il se mit à prier :- S'il y a un Dieu, qu'il veuille se révéler à moi et me montrer le chemin du salut, afin que le trouble de mon coeur se dissipe et je le servirai toute ma vie.- J'étais fermement résolu, si ma prière n'obtenait pas de réponse, à aller, avant que le jour fût levé, mettre ma tête sur la ligne du chemin de fer au passage du train. je restai en prière une heure et demie environ, attendant et espérant voir apparaître Krishna ou Bouddha, ou quelque autre saint de la religion hindoue, mais ils n'apparurent pas. je n'avais plus qu'une demi-heure devant moi. je priai plus instamment encore :- 0 Dieu ! si tu existes, révèle-toi à moi!- Soudain une grande lueur illumina ma chambre, je crus que la maison était en feu, j'ouvris ma porte, mais au dehors tout était sombre.

Alors il se passa quelque chose que je n'avais jamais attendu : la chambre fut remplie d'une merveilleuse lumière qui prit la forme d'un globe et je vis un homme glorieux debout au centre de cette lumière. Ce n'était pas Bouddha, ni Krishna, c'était le Christ. Durant toute l'éternité, je n'oublierai pas sa face glorieuse, si pleine d'amour, ni les quelques mots qu'il prononça : « Pourquoi me persécutes-tu ? je mourus pour toi, pour toi j'ai donné ma vie, je suis le Sauveur du monde. » Ces mots furent inscrits comme en lettres de feu sur mon coeur. Le Christ que je croyais mort était vivant devant moi. je vis la marque des clous ; j'avais été son ennemi, mais je tombai à genoux devant lui et l'adorai. Là, mon coeur fut rempli d'une inexprimable joie et d'une paix merveilleuse ; ma vie fut entièrement transformée ; le vieux Sundar mourut et un nouveau Sundar Singh naquit, pour servir le Christ.

Lorsque je me relevai, rempli de joie, tout avait disparu. Après quelques instants, j'allai vers mon père encore endormi ; je lui racontai la vision que je venais d'avoir et lui déclarai que j'étais chrétien. – Comment, me dit-il, il y a deux jours seulement tu brûlais la Bible et tu dis que tu es un chrétien ? Tu haïssais le Christ et maintenant tu veux le servir, comment cela se peut-il ?- Parce que j'ai vu le Christ vivant et j'ai entendu sa voix. je veux et je dois lui consacrer ma vie. Cette apparition du Christ a été le point tournant de la vie de Sundar Singh. Ce qu'aucune religion n'avait pu lui apporter, malgré des années d'attentes et persévérantes recherches, le Christ, en un instant, le lui donna. Il répondit à ses ferventes prières en emplissant son âme de cette paix merveilleuse si profondément désirée, que nulle épreuve ou persécution ne pourra désormais lui ravir.

L'obscurité a fait place à l'aube d'un jour nouveau et glorieux. ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- *Loi tyrannique à la base de la doctrine de la réincarnation : toutes nos actions, bonnes ou mauvaises, sont des germes qui nous obligent sans cesse à renaître et à recommencer cette vie d'illusion

EPREUVES ET PERSECUTIONS

Il m'a été fait la grâce, par rapport à Christ, non seulement de croire en lui, mais encore de souffrir pour lui. Saint Paul.

Sundar Singh regarde sa conversion comme une chose absolument surnaturelle, un miracle dans toute l'étendue du terme, un pur don de la grâce de Dieu. - La religion hindoue, dit-il, m'enseigna qu'il y a un ciel, et je fis tous mes efforts pour m'affranchir du péché et faire en chaque chose, la volonté de Dieu. Combien j'ai étudié nos livres sacrés, combien j'ai lutté, prié, cherché la paix dans mon âme ! J'essayais de me sauver moi-même par mes bonnes oeuvres, ce qui est impossible. J'étais fier de la religion et de la philosophie hindoues, mais la philosophie n'a jamais sauvé personne. En désespoir de cause, je suppliai Dieu de me montrer le chemin du salut. En réponse à ma prière, je vis le Seigneur et il me révéla ce que J'étais moi-même. Sundar n'a Jamais douté un instant de la réalité de la vision divine : ce n'était pas une imagination ni un rêve. On ne rêve pas lorsqu'on vient de prendre un bain froid ! D'autres ont pu la mettre en doute, la tenir pour une hallucination. Pour lui ce fut une inébranlable certitude. De ses yeux il a vu le Christ vivant ; de ses oreilles il l'a entendu lui parler dans sa propre langue, l'hindoustani. A ce moment-là il est devenu un homme nouveau, une nouvelle créature en Jésus-Christ. Auparavant il haïssait le Christ, maintenant il est prêt à souffrir et même à donner sa vie pour lui. Un ennemi de Jésus a été changé en un apôtre de l'Évangile. « Les choses anciennes sont passées, voici toutes choses sont devenues nouvelles. »

Le trouble de son coeur s'est évanoui comme un songe. - Là, dira-t-il, Christ m'a donné sa paix, cette paix « qui surpasse toute intelligence », non pour quelques instants seulement, mais pour toujours. Il n'y a pas de mots dans le langage humain pour décrire la joie incomparable qui a rempli mon coeur, mais je puis témoigner de sa réalité : c'est le ciel sur la terre. Sundar séparait nettement, des fréquentes visions qui venaient à lui dans la méditation et la contemplation intérieure, cette apparition du Christ, tout à fait inattendue. Il déclare absolue la différence entre une vision de l'esprit et cette apparition.- J'ai eu de nombreuses visions pendant mes extases, mais Jésus, je ne l'ai vu qu'une fois. Sundar ne s'est jamais prévalu de cette manifestation du Christ comme d'un sujet de gloire personnelle ; il s'humiliait du fond du coeur dans le sentiment de sa propre indignité et de sa rébellion passée. Il avait haï le Christ, combattu la foi chrétienne, brûlé la Bible devant tous et cependant, tandis qu'il était animé de cet esprit de haine, il avait été conquis par l'amour qui pardonne.- Quand Christ se révéla à moi, alors je vis que j'étais un pécheur et qu'il était le Sauveur.

Il fit l'expérience fondamentale de l'entière grâce de Dieu révélée par la mort de Christ sur la Croix, et de l'inutilité des efforts propres. Par là, il appartient à la lignée des saint Paul et des Luther, et de toute âme pour laquelle la question du péché et de la grâce est le problème central de la vie. - Il y a des heureux, disait-il, qui n'ont jamais péché comme moi et ne sont pas ouvertement opposés a Jésus-Christ ; il y en a d'autres qui ont vécu avec Christ depuis leur enfance et n'ont pas besoin d'une preuve extérieure de ce qu'ils ont reçu intérieurement.

En toute humilité Sundar se plaçait aux pieds du dernier des disciples du Christ ; il se considérait comme indigne de l'amour que Dieu avait manifesté envers lui. - Une révélation extérieure n'est pas essentielle, dit-il ; l'expérience de la grâce de Dieu est tout aussi réelle sans être accompagnée de miracles. « Heureux ceux qui n'ont pas vu et qui ont cru. »- Mais Sundar était convaincu que, dans ses circonstances personnelles, il n'aurait jamais trouve le salut sans cette révélation directe. Comme Thomas, il a été incrédule et très lent à croire,- c'est pourquoi, dit-il, je serai à la dernière place dans le royaume de Dieu.

La pensée de son péché le rendait profondément repentant.- Ces mains, dira-t-il avec humiliation, ont brûlé la Parole de Dieu et l'ont réduite en cendres. Ce sont les mains d'un pécheur que seul l'amour de Dieu a racheté ; l'unique fondement de mon pardon est la croix de Jésus-Christ, mon Seigneur. Cela reste comme une écharde dans ma chair d'avoir été un ennemi de Jésus ; cette pensée m'humilie jusque dans la poussière.- Et parce qu'il était si certain de l'amour de Christ et de son pardon, il trouvait difficile de se pardonner à lui-même. Il nous semble l'entendre dire avec saint Paul : « je ne suis pas digne d'être appelé apôtre, parce que j'ai persécuté l'Église de Dieu », ou encore : « Jésus-Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs, dont je suis le premier. »

Désormais Sundar Singh était uni à Christ pour toujours, par un lien indissoluble. « Loin de moi la pensée de me glorifier d'autre chose que de la Croix de notre Seigneur Jésus-Christ, par qui le monde est crucifié pour moi, comme je le suis pour le monde. » - Après ma conversion, dit-il, je passai trois jours en prière dans un endroit solitaire. pour demander pardon et confesser mon péché. je disais à Dieu : Pardonne-moi, car J'étais aveugle spirituellement, je ne comprenais pas ta Parole. Là, j'ai reçu l'assurance du pardon.- « Tu étais aveugle, maintenant j'ai ouvert tes yeux et tu iras pour rendre témoignage. »- Après cela j'annonçai à ma famille ce que j'avais vu et que j'étais chrétien. Les gens pensèrent que j'étais devenu fou ; d'autres que j'avais rêvé ; mais lorsqu'ils virent qu'ils ne pouvaient m'ébranler, ils commencèrent à me persécuter ; cependant ce n'était rien comparé au misérable état dans lequel J'étais auparavant.

Dans ce même temps trois jeunes garçons voulurent devenir chrétiens ; mais deux d'entre eux y renoncèrent a cause des punitions que leurs parents leur infligèrent. Le troisième fut baptisé ; puis son père, prétextant une grave maladie de sa mère, le fit revenir chez lui où il mourut peu après, sans doute empoisonné. Pendant neuf mois, Sundar ne quitta pas la maison paternelle. Il dut subir l'incompréhension, l'opposition et même la persécution. Tout d'abord son père lui parla avec tendresse, le suppliant de ne pas déshonorer sa famille. Comment lui, un Sikh, d'une branche fière et influente, pouvait-il faire partie de cette secte de chrétiens et renoncer à l'avenir qui s'ouvrait devant lui : honneurs, richesses et brillante situation ? Ce fut pour Sundar une grande tentation, car l'idée qu'il attirait le blâme sur ceux qu'il aimait le bouleversait. Mais il entendait la voix de Jésus : « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi. » Son coeur se déchira en voyant les larmes de son père ; pourtant il ne pouvait se soustraire à la vision d'En haut et à l'appel du Christ.

Un oncle, haut placé et très riche, tenta à son tour de le détourner de sa foi. Il le conduisit un jour dans sa splendide demeure et le fit entrer avec lui dans un caveau dont il referma la porte. Ouvrant un grand coffre-fort, il montra à son neveu ébloui, des richesses inouïes, des bijoux de grand prix, des pierres précieuses, des billets de banque, de l'or et de l'argent en quantité.- Tout cela est à toi si tu renonces à devenir chrétien et si tu ne déshonores pas notre nom ! Devant tant de splendeurs, Sundar se sentit un instant ébranlé, ému aussi des humbles supplications de son oncle vénéré, mais à ce moment même son coeur fut rempli d'un tel amour pour le Christ et d'un sentiment si vif de son approbation, qu'il ne lui fut pas difficile de repousser la tentation. Il n'avait alors que quinze ans ; il savait bien que pour un garçon de son âge, se déclarer chrétien représentait une impardonnable offense envers les siens et que cet acte sapait la très grande autorité de son père comme chef de famille. Il était seul ; personne pour le comprendre ou lui donner un conseil ; aucune sympathie autour de lui, mais une farouche hostilité. Son propre frère devint son pire ennemi, ses anciens amis le tourmentèrent et la population du village s'éleva contre lui avec indignation.

Le directeur de la mission presbytérienne fut accusé d'exercer une pression sur ses élèves pour en faire des chrétiens ; mais Sundar et un ami sikh- qui se convertit lui aussi à cette époque- certifièrent devant les magistrats de l'innocence de leur maître. Cependant, à la suite de toute cette effervescence, plusieurs chrétiens durent quitter le village et bientôt la mission elle-même ne fut plus tolérée et dut fermer ses portes. Sundar, dont la vie était en danger, comprit qu'il ne lui était plus possible de rester davantage dans la maison paternelle. Il quitta Rampour et alla se réfugier dans l'école de la mission presbytérienne américaine à Loudhiana. Là, les missionnaires le reçurent avec une grande bonté mais, dit-il,- je fus surpris et scandalisé de la manière de vivre de certains garçons ; car j'avais l'idée que ceux qui suivaient le Christ devaient tous être des saints ; en ceci je me trompais tristement. Si je n'avais pas eu cette apparition du Christ, et reçu de lui une vie nouvelle, je serais peut-être revenu en arrière et resté un ennemi du christianisme. Sundar décida de quitter cette école et ces chrétiens de nom pour retourner chez lui. Sa famille, le voyant revenir, pensa qu'il avait abandonné ses idées étranges, mais quand ils virent qu'il était plus résolu que jamais, l'oppression devint plus violente encore.

Tout d'abord on chercha à le persuader d'être chrétien en secret, sans confesser ouvertement sa foi. Ce fut une vraie tentation et bien des raisons plausibles pouvaient être invoquées : il n'avait pas encore l'âge légal pour agir de son propre chef ; ne pouvait-il pas attendre d'être plus âgé ? Mais la voix intérieure était péremptoire. « Celui qui me confessera devant les hommes, je le confesserai aussi devant mon père qui est dans les cieux. » Il fut conduit au maharaja qui avait eu connaissance de son histoire. Il le fit comparaître devant le « Durbar », assemblée de l'État, et le somma d'expliquer sa conduite. On lui offrit de nouveau richesses, pouvoir, belle situation ; le maharaja fit appel à son orgueil de race ; n'était-il pas un sikh, un lion, et voulait-il tomber si bas, jusqu'à devenir un chrétien, un chien ?

Rien ne put l'ébranler. Il fit un pas de plus et rompit les derniers liens qui pouvaient encore le rattacher à la religion de son peuple : il coupa ses longs cheveux, ce signe visible des vrais disciples de Nânak, et dont les Sikhs sont si fiers. Alors ce courageux témoin de Jésus fut en proie aux plus cruelles persécutions, traité comme le dernier de tous, un hors caste, un intouchable. Il dut prendre sa nourriture et dormir hors de la maison, comme un lépreux. - je me souviens, écrira-t-il plus tard, du soir où je fus chassé de chez moi ; je n'oublierai pas cette première nuit passée sous un arbre, par un temps froid. je n'avais jamais été soumis à pareille épreuve. je songeais : hier encore je vivais entouré de tout le luxe de ma maison, maintenant je tremble de froid, j'ai faim et j'ai soif, je suis sans abri, privé de vêtements chauds et de nourriture. je restai toute la nuit sous cet arbre et une joie merveilleuse et la paix inondaient mon âme ; je sentais la présence de mon Sauveur. je tenais mon Nouveau Testament dans ma main et ce fut pour moi comme ma première nuit passée au ciel. je comparais avec bonheur mon état présent à ma vie luxueuse d'autrefois. Au milieu des richesses et du confort, je n'avais pu trouver la paix ; maintenant la présence de mon Sauveur changeait la souffrance en joie. Depuis lors j'ai toujours senti sa présence.

Maudit par son père, il dut définitivement quitter la maison. Il n'emportait que les minces vêtements qu'il avait sur lui et juste assez d'argent pour prendre le train jusqu'à une station voisine. Dans sa détresse il se souvint qu'il y avait à Rampour des chrétiens ayant dû fuir les persécutions et quitter Rampour; il s'y rendit et se dirigea vers la maison d'un pasteur hindou et de sa femme. A peine arrivé le pauvre garçon tomba violemment malade; un docteur appelé déclara que Sundar avait été empoisonné. Il était clair que du poison avait été mêlé à la nourriture préparée avant son départ dans l'espoir qu'il mourrait avant d'atteindre le but de son voyage. N'était-il pas préférable qu'il mourût plutôt que de déshonorer sa famille ?

La femme du pasteur ne quitta pas son chevet. Le docteur ayant déclaré l'état désespéré, promit de revenir le lendemain matin pour les funérailles. Sundar souffrait cruellement, mais malgré son extrême faiblesse, il était convaincu que Dieu ne le laisserait pas mourir avant qu'il ait pu faire quelque chose pour son Sauveur. Il demanda au docteur de lire le récit de la résurrection de Jésus dans l'Évangile de Marc. Le docteur, qui n'était pas chrétien, se moqua de l'absurdité de cette histoire. Mais le matin venu, Sundar se sentait si bien qu'il se leva et sortit au soleil devant la maison. Le docteur, stupéfait de le retrouver vivant malgré son pronostic, s'en retourna sans même lui adresser la parole. (Quelques années plus tard, alors que Sundar travaillait à Burma, quelqu'un vint à lui :- Me reconnaissez-vous ?- Oui, dit Sundar, la dernière fois que je vous ai vu, J'étais aux portes de la mort.- Alors le docteur lui conta que sa miraculeuse guérison avait fait sur lui une telle impression, qu'il avait acheté une Bible et commencé à la lire. Il devint chrétien, fut baptisé, et entreprit un travail missionnaire à Burma.)

Lorsque Sundar fut rétabli, il se rendit à Loudhiana auprès de ses amis de la mission américaine. Ses parents firent plusieurs essais pour l'enlever de vive force. La tentative la plus douloureuse pour Sundar fut celle de son père venu lui adresser un suprême appel. Il ne put retenir ses larmes en voyant la douleur de celui-ci qui, ravagé par le chagrin, lui parlait avec émotion de l'amour de sa mère, du bonheur de la vie de famille, le suppliant de revenir à eux. Il fallut soutenir ce combat plus rude encore que la persécution. Le dernier sacrifice était fait et Sundar se retrouva seul, dépouillé de tout, renié des siens, mais uni par un amour indissoluble à son Sauveur. « Pour son amour il voulut tout perdre. »

Afin de le soustraire aux attaques perfides de ses ennemis, on l'envoya à Sabathou, petite localité non loin de Simla où vivait le Révérend Redman, un chrétien âgé qui fut pour lui comme un père et dont la maison lui était ouverte chaque fois qu'il passait à Simla. Le Rév. Redman était directeur de la Church Missionnary Society. Il l'examina avec soin et fut frappé de son extraordinaire connaissance de la vie et de l'enseignement de Jésus et de son expérience personnelle. Sundar lui dit qu'il était certain que Christ l'avait appelé à être son témoin, et que baptisé ou non, il devait aller prêcher l'Évangile.

Ce fut le dimanche 3 septembre 1905, à l'âge de seize ans, que Sundar Singh fut baptisé à Simla par M. Redman, selon le rite de l'Église anglicane. Le premier verset du Psaume 23, lu pendant le service divin, fut comme le mot d'ordre de la vie qu'il allait entreprendre : « L'Éternel est mon Berger, je ne manquerai de rien. » Ce Psaume du bon Berger, ainsi que le chapitre 53 d'Esaïe, furent les passages favoris de Sundar. Ils façonnèrent sa vie.

Dès le lendemain de son baptême, il retourna à Sabathou, le coeur débordant de joie. Toutes les luttes et les souffrances passées s'évanouirent comme une fumée devant le grand bonheur de porter le nom de Christ et de lui appartenir pour toujours.

SADHOU

Je regarde toutes choses comme une perte à cause de l'excellence de la connaissance de Jésus-Christ mon Sauveur, pour lequel j'ai renoncé à tout. Saint Paul.

- Un jour vous serez un Sadhou, lui avait dit sa mère, à maintes reprises. Il n'avait jamais perdu de vue le désir prophétique de celle qui lui avait appris à donner à Dieu la première place dans sa vie. Après sa conversion il avait clairement entendu l'ordre divin : « Tu me serviras de témoin ». Le moment était venu d'obéir à cet appel. Ne trouvera-t-il pas une porte ouverte s'il vient prêcher l'Évangile du Christ dans une robe de Sadhou tenue pour sacrée aux Indes depuis un temps immémorial ? Cette robe, symbole d'une vie ascétique de renoncement au monde et de pauvreté lui ouvrira sans doute l'entrée de toutes les castes et même les portes des zénanas.

Sa décision fut prise ; trente-trois jours après son baptême, le 3 octobre 1905, ce jeune chrétien de seize ans revêtit le vêtement jaune safran des saints Sadhous. Il allait faire de lui un homme voué à une existence errante de religieux, sans un lieu où reposer sa tête.- J'ai fait le voeu de, consacrer ma vie entière à Christ mon Sauveur, et, par sa grâce, je ne le romprai jamais ; le jour où je devins un Sadhou, j'ai revêtu cette robe pour la vie, et aussi longtemps que cela dépendra de moi, je ne m'en séparerai pas.

Sundar Singh voulait apporter l'histoire de Jésus à son peuple de la manière qui lui serait le plus accessible, d'une façon toute hindoue. Car une difficulté résidait pour les Hindous dans le comportement des chrétiens. En effet, leur costume, leur nourriture, leurs habitudes de vie, tout était différent et contraire à la mentalité hindoue. Sundar lui-même avait considéré autrefois les chrétiens comme des étrangers, introduisant des coutumes étrangères. Même après sa conversion il trouva parfois difficile de dominer ses sentiments vis-à-vis de ceux qu'il avait si longtemps méprisés ; son sang sikh semblait protester, mais sa vivante communion avec Christ lui donna la victoire. La discipline intérieure qu'il sut pratiquer triompha de cet orgueil de race, si marqué chez les Sikhs, et produisit en lui cette extraordinaire humilité envers tous les hommes.

- L'eau de la vie, disait-il, a été offerte aux âmes assoiffées de l'Inde dans des coupes européennes et non dans des vases hindous.- Il illustrait ce fait par le récit suivant :- J'ai rencontré, lorsque je voyageais dans le Radjpoutana, un brahmane d'une caste élevée. Il se hâtait pour atteindre la station ; éprouvé par la chaleur il tomba épuisé sur le quai. Le chef de gare, désireux de lui venir en aide, lui apporta de l'eau dans une coupe occidentale, en porcelaine ; le brahmane ne voulut pas y toucher, bien qu'il eût une soif intense.- je ne puis boire cette eau, dit-il, je préfère périr de soif ; je ne veux pas perdre ma caste et suis prêt à mourir.- Mais lorsque l'eau lui fut offerte dans sa propre coupe de bronze, il ne fit plus aucune objection et la but avidement. C'était la même eau, mais versée dans un vase hindou.

Pieds nus, sans argent, se conformant à la lettre aux instructions données par Jésus-Christ à ses disciples, Sundar Singh ne prit avec lui qu'une couverture et son Nouveau Testament en ourdou. Il partit de Sabathou pour aller de village en village, et de ville en ville, annoncer à son peuple l'amour de Jésus-Christ. N'était-il pas un témoin vivant de sa grâce ? Il ne mendiait jamais. Lui, le fils d'un riche et fier Sikh, dépendait pour sa subsistance de l'aumône qui lui était librement accordée. S'il avait été un Sadhou prêchant l'hindouisme, on l'eût traité avec les plus grands honneurs, rien ne lui eût manqué ; mais lorsqu'on découvrait qu'il était chrétien et qu'il annonçait Jésus, les portes se fermaient devant lui ; on lui refusait logement et nourriture. Il devait se contenter, pour vivre, de quelques fruits sauvages, de racines ou de feuilles, et trouver un abri dans de sordides caravansérails, dans des grottes ou encore sous un arbre. Parfois maudit, injurié, il était chassé et devait chercher un refuge dans la jungle, malgré le danger des cobras et des léopards.

Pendant les premiers temps il trouva peu de réponses à son persévérant effort ; il répandait la bonne semence dans des terrains durs et pierreux, au milieu de grandes difficultés et d'épreuves de tous genres, mais il savait que Christ était avec lui, et il ne se décourageait jamais. Il choisit comme premier champ de travail son propre village. Il parcourut les rues familières de Rampour, rendant témoignage à la puissance du Sauveur et parlant à tous du bonheur qu'il avait trouvé en lui. Les uns l'écoutaient, d'autres se détournaient avec mépris. Il put cependant pénétrer dans les zénanas et, dans un village voisin, une dame hindoue réunit chez elle 60 à 70 femmes des meilleures familles. Celles-ci, après l'avoir entendu, dirent entre elles :- Ce qu'il annonce est vrai, nous croyons chacune de ses paroles, Jésus est vraiment le Sauveur. Quittant Rampour, Sundar alla d'un lieu à l'autre, traversant ainsi une grande partie du Béloutchistan, de l'Afghanistan, et des merveilleuses montagnes du Cachemire. Il eut beaucoup à endurer dans ce premier voyage missionnaire ; il affronta le froid, les pluies torrentielles, la faim, la soif, la fatigue.

Dans la vallée de jalalabad, en Afghanistan, il fut informé par un homme un peu moins méchant que ses compagnons, d'un complot ourdi contre lui pour l'assassiner. Il écouta l'avertissement et se réfugia pour la nuit dans le seul endroit possible, un caravansérail plein de moustiques et de vermine. Vers le matin, il alluma un feu pour sécher ses vêtements trempés par la pluie. A ce moment arriva une troupe de Pathans, tribu musulmane fanatique et cruelle. Au grand étonnement de Sundar, le chef de la bande tomba à ses pieds ; il lui expliqua que lui et ses compagnons avaient eu en effet l'intention de le tuer, mais ils furent si remplis d'étonnement et de crainte en voyant que le froid intense de la nuit ne lui avait fait aucun mal, qu'ils pensèrent qu'Allah l'avait protégé. Ils lui demandèrent de venir les instruire. Sundar passa une semaine au milieu de ces hommes farouches, leur parlant de Jésus-Christ, son protecteur et son ami. Il quitta Jalalabad, certain que Dieu lui-même lui avait permis de répandre la bonne semence dans ces coeurs sauvages, et qu'il saurait la faire germer en son temps.

Sundar revint à Kotgarh, petite localité près de Simla dans l'Himalaya, à six mille pieds d'altitude, qui devint son port d'attache au retour de ses voyages. C'est là qu'à la fin de 1906, il rencontra M. Stokes. C'était un riche Américain, ayant abandonné fortune et bien-être pour apporter l'Évangile aux Indes en prenant le chemin du renoncement et de la pauvreté, cherchant à suivre l'exemple de saint François d'Assise dont il était un fervent disciple. Revêtant à son tour la robe de Sadhou, il se joignit à Sundar, et ils unirent leurs forces pour entreprendre un périlleux voyage à travers les montagnes et dans des contrées malsaines. Ils supportèrent de grandes souffrances. Sundar, épuisé par de fréquents accès de fièvre et de violents maux d'estomac, tomba un jour presque inconscient au bord du chemin.- J'étais anxieux à son sujet, écrit M. Stokes, car nous étions seuls et le temps était très froid ; la douleur se lisait sur les traits de Sundar, je savais qu'il ne se plaignait jamais, et me penchant à son oreille, je lui demandai comment il se sentait.- je suis très heureux ! Comme il est doux de souffrir pour l'amour de Christ ! murmura-t-il d'une voix presque imperceptible, avec un léger sourire sur son visage émacié.- Cette joie dans la souffrance s'est manifestée à maintes reprises au travers de ses épreuves ; elle a été un trait distinctif de son expérience chrétienne et un des secrets de son influence.

M. Stokes parvint à conduire Sundar, non sans peine, jusqu'à la demeure d'un Européen qui les reçut avec la plus grande bonté. Cet homme qui n'avait jamais beaucoup pensé à Dieu et au salut de son âme, fut si frappé par la sérénité, la foi, l'amour, la patience de Sundar, qu'il se mit à réfléchir et, peu après, se tourna vers le Sauveur de son hôte. En 1907, les deux amis travaillèrent ensemble dans l'asile des lépreux à Sabathou, puis à Lahore dans un camp de pestiférés où, sans crainte de la contagion, ils se consacrèrent jour et nuit aux soins des malades et des mourants. Ils rassemblèrent aussi, selon les instructions de l'Évangile, les enfants infirmes, boiteux, estropiés, aveugles, ou ceux de parents lépreux, et organisèrent pour eux des camps dans l'air salubre des montagnes. Ils voyaient Christ au travers d'eux. « ... J'étais étranger et vous m'avez recueilli... J'étais malade et vous m'avez visité. » On peut s'imaginer la joie de ces enfants déshérités d'être au bénéfice de tant de soins et d'amour.

Lorsqu'en 1908, M. Stokes partit en vacances en Amérique, le Sadhou se retrouva seul ; il décida alors de donner suite à un projet qu'il avait depuis longtemps dans l'esprit : un voyage à travers le Népal et le Tibet dont les portes étaient entièrement fermées à tout travail missionnaire. (*) De 1909 à 1910, cédant aux sollicitations de ses amis chrétiens, le Sadhou consentit à faire des études de théologie. Il semblait utile qu'il acquît des connaissances plus vastes en vue d'élargir le cercle de son influence, limitée à l'évangélisation des païens, et de l'étendre aux communautés chrétiennes. Il subit l'examen de première année et entra d'emblée en seconde année au collège théologique de Lahore. Pendant les vacances il continuait ses campagnes d'évangélisation. Les études apportèrent peu de chose à sa piété simple et directe. Il semble au contraire qu'elles éveillèrent en lui une certaine aversion pour l'intellectualisme théologique dont il parlera si souvent dans ses discours.

Là, comme à Loudhiana, il se sentit étranger parmi les étudiants qui se préparaient au saint ministère. Comme Sadhou, le niveau de sa vie spirituelle était bien supérieur à la leur et ses habitudes religieuses d'une autre essence que celle de la vie du séminaire ; aussi passait-il seul dans sa chambre la plus grande partie de son temps, à part les repas, les cours et les heures fixées pour la prière. Les étudiants se sentaient silencieusement condamnés par sa présence, bien que Sundar fit son possible pour éviter tout ce qui pouvait être considéré comme un blâme de sa part ; il attendait humblement de gagner leur confiance et leur affection, mais il ne semblait point y parvenir.

Un jour, un des étudiants, particulièrement hostile au Sadhou, le vit assis seul sous son arbre ; il s'approcha de lui sans être aperçu. A sa grande surprise il trouva Sundar en larmes, répandant à haute voix son coeur devant Dieu dans une ardente supplication en faveur de cet étudiant venu là sans qu'il s'en doutât. Il priait que, s'il y avait eu un tort de sa part, Dieu veuille le lui pardonner, et qu'un véritable amour puisse s'établir entre eux. En entendant cette fervente prière, le jeune homme fut repris dans sa conscience ; il demanda aussitôt pardon à Sundar et, dès ce jour, ils devinrent d'intimes amis. C'est cet étudiant lui-même qui donne ce récit. Le Sadhou fut profondément malheureux dans cette école de théologie. Il semblait être comme un oiseau de la forêt battant des ailes aux barreaux de sa cage. Il soupirait après la liberté de Kotgarh, sous le ciel bleu et dans la solitude des montagnes.

En 1910 il reçut sa licence de prédicateur dans l'Église anglicane ; mais lorsqu'il comprit que, ministre consacré, il ne pourrait pas prêcher dans d'autres églises, ni annoncer librement l'Évangile partout où Dieu le conduirait, il considéra que ces restrictions ne s'accordaient pas avec sa mission de Sadhou. Aussi après beaucoup de prières, vit-il clairement qu'il ne devait se rattacher à aucune organisation extérieure. Il pria respectueusement l'évêque, qui avait été spécialement bon pour lui au cours de ses études, de bien vouloir lui reprendre sa licence de bachelier en théologie. L'évêque, comprenant la vocation du Sadhou, accepta sa démission, mais elle ne l'excluait pas de l'Église anglicane, à laquelle il appartenait par le baptême. Ses relations avec ses amis anglicans restèrent aussi cordiales qu'auparavant.

Dès lors, le Sadhou ne se joignit jamais à aucune association humaine, si ce n'est l'Église chrétienne universelle. Il disait :- Les rivières prennent leur source dans les hautes montagnes de l'Himalaya, et se fraient leur propre chemin en descendant vers la plaine apporter l'eau fraîche et pure des sommets. C'est l'image d'une vie chrétienne qui dépend directement du Christ lui-même, source des eaux vives. Lorsque cette eau atteint la plaine, elle se divise en canaux et, par des moyens artificiels, irrigue les terres desséchées, entraînant avec elle beaucoup de boue qui en ternit la pureté. Ces canaux ont leur utilité, mais pour être constamment alimentés, ils ont besoin de l'eau pure qui jaillit des hauts sommets.

Sundar reconnaissait qu'une organisation pouvait être utile pour répandre l'Évangile parmi les masses, mais pensait que sa consécration à son Maître le conduisait dans un chemin dépendant uniquement de Dieu, individuel et solitaire. Il avait besoin d'une entière liberté. Il était un jour ici et les jours suivants ailleurs. Très tôt le matin, avant le lever du soleil, il partait sans aviser personne, pour un nouveau voyage, laissant un simple mot disant qu'il avait entendu l'appel de Dieu, puis il réapparaissait soudainement, on ne savait d'où. Libéré de tout lien ecclésiastique, il continua à rendre son témoignage comme Sadhou, annonçant l'Évangile partout où il allait ; nul ne le rencontrait sans apprendre que Jésus était venu dans le monde pour sauver les pécheurs.

Le Sadhou redoutait par-dessus tout une vie absorbée par une trop grande activité, ne laissant point de temps pour la prière. Il aimait la solitude de toute son âme, mais contrairement à l'idéal hindou qui, pour trouver Dieu, prêchait le détachement de toute société humaine, il avait compris que le service des hommes était un facteur primordial dans le service de Dieu. Son ardent désir d'être entièrement à la disposition de Christ le faisait sortir de ses plus profondes méditations par amour pour ceux qui souffraient et avaient besoin de lui. Une vie livrée à Dieu est toujours une vie consacrée aux autres. Le Rév. Redman qui revit Sundar deux ans après son baptême, fut profondément impressionné par la maturité de son caractère chrétien ; il n'était plus le garçon d'alors, mais un jeune homme affermi dans la foi, bien qu'il eût à peine 19 ans.

L'influence silencieuse de sa vie faisait une grande impression. Chrétiens et non-chrétiens venaient à lui pour trouver aide et conseil, et sa réputation s'étendait de plus en plus loin. Il fut appelé à participer à des conventions chrétiennes à travers tout le nord de l'Inde. A la fin de 1912, après un travail assidu, il résolut de réaliser enfin le projet qu'il caressait depuis longtemps de jeûner pendant quarante jours en un endroit solitaire. Il pensait par là devenir plus conforme à Jésus-Christ dans sa vie intérieure. Peut-être était-il influencé, sans s'en rendre compte, par l'ascétisme des Hindous.

Malgré l'avis négatif d'un médecin franciscain qui travaillait avec lui et auquel il avait confié son intention, Sundar mit son plan à exécution et, le 25 janvier 1913, il se retira dans la jungle pour se livrer à la méditation et à la prière. Afin de garder quelque notion du temps écoulé, il avait placé près de lui un tas de quarante pierres. Chaque jour il en jetait une de côté, mais ses forces déclinèrent rapidement, et il devint si faible qu'il fut incapable de continuer ce geste. Sa vie spirituelle, au contraire, grandit en clarté et en liberté. Il vivait dans une sorte d'extase dans le monde surnaturel ; tandis que sa vie physique s'affaiblissait, au point de ne pouvoir plus distinguer les objets qui l'entouraient, par sa vision spirituelle il contemplait le Christ crucifié, ses mains et ses pieds percés et son visage empreint d'un ineffable amour. Alors que son corps était inerte et insensible, son âme goûtait la plus profonde paix et la plus merveilleuse joie.

Avant qu'il eût atteint les quarante jours, des bûcherons, coupeurs de bambous, le trouvèrent par hasard dans la jungle et le portèrent à Dehra-Dun. Là, quelques paysans chrétiens l'identifièrent grâce à son nom inscrit dans son Nouveau Testament. Ils le transportèrent en char dans le village chrétien de Annfield où il fut soigné avec amour et se rétablit rapidement. (Le bruit de sa mort s'était répandu partout, sans doute par l'entremise du médecin catholique à qui Sundar avait donné l'adresse de ses amis. Par télégramme il leur avait annoncé son décès qui sembla confirmé par sa longue absence. Un service funèbre fut organisé par le Rév. Redman à Simla, et sa mort fut publiée dans les journaux missionnaires, accompagnée d'une notice nécrologique.)

Sundar revint à Simla, où son ami le Rév. Redman, le rendit attentif au danger d'une pareille expérience. Mais le Sadhou resta convaincu des heureux résultats de ce jeûne. Avant, il lui était arrivé de se plaindre intérieurement de ce que le Seigneur n'intervenait pas lorsqu'il souffrait de la faim et de la soif, puisqu'il lui avait donné l'ordre de ne pas prendre d'argent avec lui. Après son jeûne il pensait : C'est la volonté de mon Père, peut-être ai-je fait quelque chose qui lui déplaît. - J'étais parfois tenté d'abandonner la vie de Sadhou et de retourner dans la maison de mon père, de me marier, et de vivre dans l'aisance. Ne pouvais-je pas être un bon chrétien et mener, là aussi, une vie de communion avec Dieu ? Mais, bien qu'il n'y ait pas de péché pour d'autres à vivre dans le confort, à avoir de l'argent et une famille, je compris que Dieu m'appelait à suivre une autre voie. Mon réel mariage était avec Christ. Toutes ces tentations momentanées, et certains doutes qui l'avaient parfois troublé, disparurent à tout jamais : il savait qu'il avait été renouvelé et fortifié dans sa vie intérieure. Il arrivait à la certitude que l'âme est indépendante du corps, question qui l'avait souvent rendu perplexe. Par-dessus tout, il était maintenant persuadé que la paix dont il jouissait n'était pas une expérience subjective de quelque force secrète, mais le résultat objectif de la présence de Dieu en lui.

Sundar Singh entra en contact avec les membres de la mission secrète des Sannyasis, chrétiens qui se considéraient comme les disciples du Christ asiatique. Dispersés dans l'Inde entière, au nombre de plusieurs centaines de mille, les Sannyasis appartiennent en général à la classe cultivée ; ils ont l'habitude de se rencontrer très tôt le matin dans des maisons de prière qui ressemblent aux temples hindous. Bien souvent, en temps de danger, le Sadhou avait été secouru par eux ; à maintes reprises il les enjoignit de sortir de leur christianisme secret et de proclamer Christ ouvertement, mais ils répondaient :- Christ nous a appelés à être pêcheurs d'hommes ; un pêcheur ne doit point faire de bruit, sinon les poissons s'échappent de son filet. C'est pourquoi nous travaillons dans le silence, et quand notre filet sera plein, le monde verra ce que nous avons fait.

Dans les années suivantes, Sundar fit la connaissance du directeur de l'Université chrétienne de St-Stephen Collège à Delhi, le Principal Susil Rudra. Ils se lièrent par une même consécration au service du Christ, et Sundar l'aima comme son père. Ce fut une grande joie pour Susil Rudra, dont le coeur était souvent attristé par la vie de beaucoup de chrétiens hindous, de trouver ce disciple du Christ si entièrement consacré à son Maître. Si seulement le témoignage chrétien aux Indes pouvait suivre la voie tracée par ce jeune Sadhou, tout irait bien ! De nombreux problèmes se posaient dans l'Église chrétienne du Punjab, et certaines difficultés avaient surgi parmi les jeunes étudiants venus de toutes parts à St-Stephen Collège pour leur éducation universitaire. Certains d'entre eux étaient destinés à devenir des « leaders » dans l'État ou dans l'Église.

Alors que les Européens cherchaient à faciliter la vie matérielle des jeunes Hindous et vivaient eux-mêmes assez confortablement, le message de la Croix était voilé à leurs yeux et n'avait guère de prise dans une telle atmosphère.- Nous faisions notre travail, dit le principal Rudra, entourés de trop de confort extérieur, et il ne semblait pas possible de sortir de ce cercle vicieux et de changer notre genre de vie. C'est alors que le Sadhou vint inconsciemment à notre aide en apportant son témoignage aux étudiants qui se réunissaient autour de lui pendant de longues heures et l'écoutaient jusque tard dans la nuit. Le simple récit de ses voyages et de ses souffrances au Tibet, fait par lui-même, enflamma leur coeur. Ils furent saisis par l'esprit d'abnégation du Sadhou et désirèrent monter à Kotgarh pour y vivre, à son contact, une vie de sacrifice et de renoncement. Ce que nul autre n'avait pu faire au collège, Sundar, un jeune comme eux, l'accomplit plus encore par son exemple que par beaucoup de paroles. Le changement qui se produisit chez de nombreux étudiants fut remarquable, et plusieurs entrèrent dans une vie entièrement consacrée au service de Dieu et de leurs frères. Comment expliquer ce miracle ? Sundar avait perdu sa propre vie. Ainsi la Croix fut non seulement prêchée, mais vécue, et là réside toute la différence.

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(*) Nous relaterons plus loin, aux ch. 5 et 6, divers épisodes de ce voyage.

- suite

 

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